Luc SCIBERRAS, PROMOTION 2022

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À peine un an après l'obtention de son diplôme, Luc Sciberras major de promotion 2022 en Architecture Intérieure, nous parle de sa riche expérience professionnelle, de ses projets futurs et de ce qu'il retient de son passage à Penninghen.

Pourquoi as-tu choisi Penninghen ?

J’étais étudiant en prépa artistique à Bruxelles où je vivais depuis trois ans. Après le bac, je savais que je voulais faire quelque chose d'artistique mais je ne savais pas quoi exactement. Ma famille n’est pas issue du secteur de l’art, je ne savais pas dans quoi je me lançais. Cette prépa en Belgique c’était un éveil créatif pour moi mais je me suis vite retrouvé dans une zone de confort, je voulais changer. J’ai regardé les écoles en fonction des classements en France et le nom de Penninghen ressortait. Je n'en avais jamais entendu parlé.

Je suis venu à Paris pour voir l’école et je ne sais pas comment mais je me suis retrouvé dans une épreuve de tests avec des élèves de prépa où il fallait dessiner un modèle vivant. Je pensais que j’étais en train de passer un concours d’admission. Ça m’a au moins permis de découvrir les ateliers, le quartier… et ça m’a plu ! L’école m’a rappelé quelques jours plus tard pour confirmer mon inscription et en cinq jours j’ai décidé de quitter Bruxelles pour Penninghen. J’aimais bien mon école en Belgique mais j’avais un peu l’impression, de manquer de perspective. J’avais aussi peur de tout quitter. Je me souviens en avoir parlé à mon père qui m’a dit “dans la vie il ne faut pas avoir peur de bouger” et je pense que j’avais besoin de son avis, de son accord à ce moment-là.

Quels souvenirs gardes-tu de ton année préparatoire en arts appliqués ?

Honnêtement, le changement recherché était au rendez-vous, c'était beaucoup d'un coup. Tout était nouveau, l'école, la vie, la ville, ça demandait un effort d'adaptation général. Je sortais d’une année où j'avais mes repères, des habitudes. J’avais besoin d’être mis à l'épreuve. Je me souviens de cette dynamique de travail, cette envie de bien faire pour chaque projet. Je n’avais que très peu d'ami, du moins assez peu de temps à leur consacrer... Non pas parce que je suis asocial mais je m'étais mis dans une bulle de travail.

Qu’en retiens-tu ?

La prépa m’a appris à être rigoureux dans le travail, à mettre certaines choses de côté et à m’organiser. Je ne comptais pas mes heures pour rendre des choses créatives mais je n’ai jamais fait de nuit blanche de toute ma scolarité à Penninghen. Je ne me suis jamais laissé submerger par le travail. C'était peut-être là l'une des limites principales que je me fixais. J'aime épargner ma liberté, même à rude épreuve. Vraiment Penninghen, enfin surtout la prépa, ça a été une expérience, qui m'a beaucoup appris. A l'âge où l'on se construit, ces années sont importantes, on en apprend notemment beaucoup sur soi-même.

Comment l’école apprend à développer une idée ?

Ça dépend du caractère de l'élève je pense. Moi je suis assez solitaire dans ma démarche de travail, je n’avais pas beaucoup d’interaction avec les enseignants mais celles que j’avais avec eux étaient importantes pour moi car je suis très sensible au langage, aux mots. Mais il y a des élèves qui aiment être accompagnés plus constamment. C’est un risque en soi, il y a des projets que j’ai choisi de complètement recommencer parce qu’une fois présentés au prof, ils ne me convenaient plus. Ce n'est pas facile d'accepter les remarques mais être capable de remettre son travail en question comme défendre ses idées font partie du processus créatif.

As-tu gardé cette habitude de travailler seul ?

Oui, ça a été mon mode de fonctionnement pendant les cinq années. Jusqu’au bout et même jusqu'à mon diplôme lors de mes interactions avec mon directeur de diplôme, Anthony Fitoussi. C’est quelqu’un de respectueux et très observateur, il s’adapte à ses élèves. Il savait comment je fonctionnais, il m’a accordé beaucoup de confiance car il savait très bien que je n’étais pas le genre d’étudiant qui préférait un suivi trop "hebdomadaire". Je lui présentais mon projet à chaque étape importante. Avant de dessiner j’écris énormément, j’aime beaucoup écrire pour penser à mon sujet. Il accordait de l’importance, comprenait et respectait cette démarche là.

Tu savais dès le départ que tu voulais faire de l’Architecture Intérieure ?

Non, en prépa j'étais un peu attiré par la Direction Artistique aussi. J’ai hésité mais je ne regrette pas d’avoir choisi l’Architecture Intérieure. Je trouvais ça plus concret, le côté abstrait de la Direction Artistique me faisait un peu peur. Le travail de volume et d’espace m’intéressaient vraiment, j’avais peur d’être limité dans mon rapport à l'espace en Direction Artistique.

Je savais que de toute façon je pourrais toujours faire des choses artistiques même en Architecture Intérieure. Je me suis dit que j’aurai plus de facilité à traduire une émotion si on m’accorde un espace à revisiter, aménager, décorer ou conceptualiser plutôt qu’au travers d’un logo ou d’une affiche comme la DA ne se limite pas à ça, c'était l'idée. Mais j’aimais beaucoup les deux filières. Je pense que si aujourd'hui j’ai besoin de donner une direction artistique à un projet, je le ferais en étroite collaboration avec un ancien de l'école !

Comment résumerais-tu tes quatre années d'Architecture Intérieure ?

Déjà je dirais que cinq ans c’est très long et très court en même temps. C’est bizarre de dire ça, c’est le genre de phrase qui m’aurait énervé à l’époque en plus. C’est long parce que chaque année est importante, chaque année sert la suivante et c'est court parce tout s’enchaîne et file et lorsque l'on se retourne sur l'expérience générale c'est qu'elle est déjà derrière, terminée...

Pourquoi recommanderais-tu de choisir Penninghen pour se former en Architecture Intérieure ?

Je recommanderais le cursus parce que c’est complet. Pour un élève qui ne sait pas exactement ce qu’il veut faire en entrant à Penninghen, il y a de grande chance qu’il trouve sa voie, ses passions et si à la fin de sa scolarité il hésite encore c’est que c’est bon signe, c’est qu’il a encore plein de chose à explorer. Je suis quelqu’un qui fonctionne par choix et je suis fidèle à mes choix mais finalement, ça ne m’a pas fait de mal d’avoir une école où il faut viser large.

L’image de l’école est positive pour le dessin notamment, on est réputés pour être de bons éléments, pour notre organisation et notre capacité à travailler. La qualité des professionnels enseignants, des intervenants extérieurs, tout le réseau de l’école… Tout ça c’est un gros point positif. Pour moi c’était un complexe de ne pas avoir de réseau professionnel à l’époque. Lorsqu’il fallait trouver mon stage par exemple, j'avais aucune ou très peu de connexion. Au final c’est mieux car j’étais obligé de chercher et je me suis constitué mon propre réseau petit à petit.

Considères-tu que la pédagogie de Penninghen va au-delà de la théorie ?

Ça dépend de chaque cours et de chaque enseignant mais dans l’ensemble, et c’est ce qui est agréable, ils nous laissent la liberté de créer des choses. La technique peut parfois nous faire défaut mais on apprendra sur le terrain.

Un an après ton diplôme, où travailles-tu ?

Je travaille avec l'architecte Charles Zana, qui faisait partie des membres du jury de ma promotion. Il ne m’a pas évalué mais il était venu voir mon diplôme, parce qu’il avait eu de bons échos et c’est quelqu’un d’assez curieux. J’avais déjà reçu plusieurs propositions donc je voulais voir comment ça se passait en entretien avec Charles Zana et l’échange qu’on a eu m’a plu donc j’ai accepté son offre. Aujourd’hui je travaille en freelance dans son agence. J’ai préféré le statut d’indépendant plutôt que le salariat car je ne voulais pas me sentir bloqué par un contrat. Je voulais me sentir libre je peux poser des jours à ma convenance, je n'en abuse pas. Charles est assez souple là-dessus, il sait que les jours où je suis à l’agence je suis complètement investi et efficace.

 

Quel est ton rôle au sein de l’agence ?

J’ai un rôle un peu particulier, je suis à la créativité de plusieurs projets. Quand il y a un concours par exemple, je m'occupe de tout ce qui concerne la présentation, tout ce qui est graphique. Parfois je suis missionné sur un projet pour aider sur la conception des chefs de projets. Il utilise et met à profit tout ce qu’il a aimé dans mon diplôme et ce qu’il a retenu de sa première interprétation. Il a vu que j'étais assez libre dans ma créativité, que j’aimais bien penser des choses nouvelles, des concepts… C’est quelque chose qui me plait donc il le met à profit.

Je travaille sur plein de projets différents en même temps. Je fais aussi bien des plans que des moodboards que des présentations clients. En ce moment par exemple, je travaille sur un super projet de collection de faïences italiennes qui vont être exposées à Miami. Je travaille en direct avec la manufacture. Je m’y suis rendu d’ailleurs à Florence, pour valider les coloris et les prototypes et je vais à Miami ce mois-ci dans la continuité du projet qui semble faire succès.

Je trouve ça super que Charles me fasse confiance et me donne accès à ce projet prestigieux, c’est valorisant. Je ne peux pas travailler en ayant quelqu’un sur mon épaule tout le temps, c’est une question de tempérament. Je n’aime pas qu’on me dise quoi faire, j’aime bien comprendre les choses par moi-même. On fonctionne comme ça avec Charles.

Je travaille actuellement aussi pour Vuitton, pour une marque de bijoux et aussi sur u “The salon”, à New York, qui sera une expo type le PAD. Charles fait appel à moi pour plein d'autres choses en parallèle, l’édition de son livre autobiographique par exemple. À chaque fois je m'immisce dans un projet je propose, je conceptualise et après je passe à autre chose. J’aime bien faire plein de choses en même temps, c’est ce qui me plaît, ça me rappelle l’année préparatoire où j’avais mille projets à gérer. À ma demande récemment, Charles projette de me confier en parallèle un projet d'architecture afin d'approfondir ma méthodologie et la technique, le monde du chantier....

Quelle place laisses-tu à la création dans ton travail ?

Dès que je suis en vacances je pense beaucoup à tout ce que je veux et pourrais faire même quand je suis en vacances, j’ai toujours besoin de penser, d'écrire, d'imaginer, de créer… J’ai toujours besoin de ça. Idéalement j’aimerais être artiste designer, concepteur et créer plein de choses mais il me faut du temps, c’est pour ça qu’un jour je pense monter mon studio.

Comment t'organises-tu ?

Je ne veux pas me lancer tout feu tout flamme, je veux conserver un équilibre entre ma vie perso et ma vie pro. Je dois trouver mon organisation et m’imposer une rigueur. La meilleure expérience de toute ma vie a été la préparation du diplôme : trois mois où chaque jour j’avais ma liste de choses à faire, ma journée pour moi, dix heures où j’étais seul à m’organiser et je savais très bien que je n’allais pas rien faire. J’étais libre. Durant cette préparation du diplôme je faisais plein de choses en parallèle : des coachings sportifs sur les quais de seine, je travaillais dans une chocolaterie 3 jours par semaine et je préparais mon diplôme. J’ai un tempérament relativement calme mais j’ai énormément d’énergie. Je canalise mon énergie avec le sport mais j’ai aussi besoin de beaucoup réfléchir.

Penses-tu t’être révélé en faisant Penninghen ?

Certainement ! Chaque année joue un rôle, nous apprend quelque chose, l’apprentissage est graduel et j’ai fini en me sentant à l’aise en 5e année, avec l'envie de bien faire et de profiter même. Il y a un effet crescendo. J’ai gagné en maturité et me suis calmé. J’ai appris à m’exprimer devant une audience, à présenter des projets à révéler plus sereinement ce qui depuis petit surgissait plus fort que moi ou maladroitement.

Que retiens-tu de la journée de jury de diplômes ?

C’est un exercice incroyable ! Devoir faire huit fois la présentation de ton projet à des gens très qualifiés et professionnels. Huit fois sans flancher, à essayer de présenter quelque chose de personnel, à y croire pour convaincre la personne face à toi. C’est un exercice complexe, une performance ! Le diplôme m’a mis dans une dynamique où même une fois fini, j’avais encore envie de travailler, j’avais envie de faire plein de choses. Aujourd’hui encore, je travaille en agence mais je ne veux pas me sentir comme un oiseau en cage. C’est pour ça que je suis obligé d’avoir des projets personnels à côté, non pas pour gagner ma vie mais la construire, c'est pour moi, définir mes perspectives d'avenir pour mieux les atteindre.                                   

Quels regards portes-tu sur les diplômes de cette année ?

C’est une promo dont j’étais proche donc ça m’a rendu très heureux pour eux. Je me suis senti assez naturellement investi. Ils étaient tous unis, c’était beau à voir. J’étais content de revenir dans l’école, comme je le suis d'ailleurs de faire ce témoignage. De la même façon, que je suis heureux des cours avec Charles Zana aux 5e année. Je garderai toujours un bon souvenir de l’école, de ce qu’elle m’a permis de vivre, de ce qu’elle m’a appris sur moi, sur les autres, de mes rencontres...

Et si tu avais de futurs conseils à donner aux futurs diplômés d’Architecture Intérieure ?

Je leur dirais de conserver leur touche personnelle, ne pas se laisser influencer, de défendre leur caractère. Après tout, c'est ce qui fait l'unicité de chacun. Ça n’est pas de la prétention car il faut rester humble mais il faut aussi savoir se mettre en avant, assumer et ne pas avoir honte de ce qu’on à envie de créer et de proposer. Il faut savoir faire sortir ce qu’il y a en nous, sans honte, et prendre du recul pour savoir et comprendre comment c’est perçu.

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